mariage
Mariage et réclame
Une réclame, aussi habile que gracieuse, a fait récemment le succès d’un théâtre américain.
Un journal annonçait qu’une jeune fille très belle et très riche demandait un mari avec ou sans fortune, mais élégant et de caractère doux. La jeune miss serait tous les soirs au See Theater et elle priait les prétendants de s’y trouver également pendant un mois, pour qu’elle pût choisir « dans le tas ».
Le jour même où parut cet avis, la salle de spectacle s’emplit en un clin d’œil d’une foule d’hommes jeunes et vieux, beaux et laids, mais tous bien mis, soigneusement gantés. On refusa du monde.
Le directeur fit salle comble pendant un mois.
« Ma revue. » Paris, 1907.
Petit problème juridique
Est-il nécessaire, pour célébrer valablement un mariage, d’avoir au préalable revêtu la classique redingote ? A défaut même de veston, peut-on procéder à cette cérémonie, lorsqu’on porte jupons… et pour cause ? La question vient d’être posée aux environs
de Mende d’assez comique façon.
On sait (ou, du moins, il faut d’abord savoir) qu’à Rieufort-de-Randon, gros bourg du département de la Lozère, le maire a été tout récemment révoqué de ses fonctions et que l’adjoint est démissionnaire. Par suite de ces incidents, les fonctions de premier magistrat de la commune ont été dévolues à M. Pons, conseiller municipal, dont l’instruction est des plus rudimentaires. Or, celui-ci, ayant à célébrer un mariage, refusa de procéder aux formalités d’usage, sous prétexte qu’il ne savait pas lire et manquait d’expérience.
Grand émoi dans l’auditoire et cruelle déception des futurs époux. Allait-on se trouver obligé de s’en retourner comme on était venu ? Le festin de noce, tout prêt, devrait-il être renvoyé ? C’est ce que ne voulut pas Mlle Daudé, fille du maire révoqué, qui remplissait les fonctions de secrétaire de mairie. Sans embarras aucun, elle posa les questions d’usage, donna lecture des articles du Code civil, prononça la formule sacramentelle, bref, fit tout ce qu’aurait dû faire le conseiller-maire, si bien que la cérémonie s’accomplit et que les désirs de chacun parurent ainsi réalisés.
Mais ici intervient la loi, qui avait négligé de prévoir le cas. On demande, maintenant, si un mariage célébré dans de telles conditions est valable. La plupart des chroniqueurs qui se sont occupés de la question estiment qu’il est nul. En aucun cas, en effet, le secrétaire de la mairie, fût-il du sexe gracieux, ne saurait avoir la capacité d’officier de l’état civil. Pour être valable, le mariage doit être célébré par le maire, l’adjoint délégué ou le conseiller municipal désigné au rôle. Pour le cas des époux de Rieufort, il y a eu incompétence de l’officier public; donc, nullité, et le tribunal de Mende va, sans doute, être saisi par le Parquet.
Le tribunal de la Seine dut s’occuper, il y a quelques années, d’une affaire qui fit grand bruit à l’époque pour son étrangeté, et qu’on a appelée « l’affaire des mariés de Montrouge ».
Six mariages avaient été célébrés à la mairie de Montrouge par un conseiller municipal qui n’était pas celui régulièrement désigné au tableau de roulement. Le procureur de la République saisit le tribunal civil, qui prononça l’annulation des six mariages, « non pour incompétence de l’officier public (c’était, en effet, un conseiller municipal), mais pour défaut absolu de qualité et de pouvoir en sa personne ».
L’arrêt, d’ailleurs, fut corrigé par la Cour de cassation, qui estima valides les mariages en raison de la commune erreur de tous ceux, marieur et mariés, qui avaient participé à leur célébration.
Mais ce qu’il y eut de plus drôle, dans toute cette affaire, c’est que, prenant fait de la décision du tribunal qui annulait les mariages, et sans attendre la sentence des juges suprêmes, cinq des maris intéressés revinrent, avec leur femme, faire légitimer leur union. Le sixième ne revint pas.
Fût-il le plus négligent ou le plus sage ?…
« Les Annales. » Paris, 1905.
Pudibonderie et mariage à bail
Le Daily News raconte que les femmes du Minnesota sortent la nuit avec de grandes feuilles de papier blanc et des pots de colle, et qu’elles couvrent de ces feuilles les affiches théâtrales sur lesquelles des femmes sont représentées en maillot.
C’est de cette manière que ces dames protestent contre le rejet d’un projet de loi qui a été soumis l’année dernière à la législature de l’Etat et qui demandait qu’il fût défendu aux actrices de se montrer en maillot sur la scène. Le même journal ajoute que les femmes du Minnesota, ne voulant pas dire la jambe (leg) d’un piano, d’une chaise, d’une table, ont remplacé ce substantif indécent par le mot membre (limb). Dans un autre Etat de l’Ouest, les dames, encore plus pudibondes, ont voilé, il y a quelque temps, toutes les statues composant une magnifique collection que possède la bibliothèque publique. On a revêtu Mercure d’un pantalon et d’un veston, drapé Vénus dans un ample peignoir et mis une culotte courte au petit Cupidon jouant à ses pieds.
L’on croyait les Américains d’esprit moins pudibond. Il semble que ce soit une histoire d’Anglaise que le Daily News nous ait contée là. Et même l’Angleterre entre dans le mouvement : un Anglais propose de ne plus se marier qu’à bail.
M. Donisthorpe n’est peut-être pas l’inventeur de cette idée qui a pu venir à quelque martyr du mariage, mais il s’en fait le propagateur, l’apôtre, Voici comment un de nos confrères résume les idées exprimées par cet Anglais « antimariageux. »
Ce brave homme demande au législateur la création du mariage à bail ! Non pas un bail emphythéotique, presque éternel. pas même l’espace des trois six neuf prévu par les propriétaires, mais un simple petit marché en vertu duquel un homme et une femme cohabiteront légitimement pendant douze mois. Tout engagement pour une durée plus longue serait nul, et l’officier de l’état-civil qui aurait l’imprudence de l’accepter et de le consigner sur ses registres serait passible d’une forte amende.
Le divorce, après tout, n’est pas une solution gaie, je la trouve même déplorable. Un homme est malheureux en mariage : la loi vient à son secours et le délivre du fléau domestique, de sa femme. C’est bien. Mais après ? S’il aime la compagnie et si sa moralité lui interdit d’en choisir une illégitime, que fera-t-il ? Faudra-t-il, pour tromper les ennuis de sa chambre, qu’il se remarie et risque encore une fois les dangers d’une association ? Cruelle perspective ! Avec le mariage à bail, la pénible alternative du mariage obligatoire ou du célibat forcé n’existera pas : l’homme choisira dans le tas une personne aimable et s’associera avec elle pour une année.
Il y a bien la délicate question des enfants. Le moraliste anglais l’a tranchée de lamanière la plus simple : en se quittant, les époux tireront au sort pour savoir celui des deux qui devra garder le rejeton. Ce ne sera pas plus difficile que cela.
Ils vont bien, quand ils s’y mettent, en Angleterre.
« La Joie de la maison. » Paris, 1892.
Elles ont épousé un arbre
M. Port, anthropologiste anglais, décrit dans le Globus une coutume indienne de mariage symbolique qui fera le bonheur de la Société des amis des arbres.
Dans certaines régions hindoues, une jeune fille ne peut se marier qu’après sa sœur aînée. Mais pour surmonter la difficulté, la sœur aînée peut épouser un arbre, des plantes ou des objets inanimés. Les suites fâcheuses que ne pouvait manquer d’entraîner la transgression aux coutumes, se trouvent de la sorte évitées, et la jeune sœur peut se marier en toute sécurité.
L’inconvénient se réduit à avoir pour beau-frère un peuplier, un orme ou un sapin. Mais il y a des compensations quand ce proche parent est un chêne dont il a nécessairement le coeur, ou bien un prunier, ce qui permet à la sœur ainée de secouer son époux suivant la méthode usitée dans les mariages non symboliques. Les dames indiennes qui ont des propensions au veuvage épousent tout naturellement un saule pleureur, et celles qui ont le caractère particulièrement cassant, un acacia.
« La Tradition. » Paris, 1900.
Un mariage par surprise
Un événement, qui occupe vivement la haute société de Madrid, s’est produit dimanche dernier, dans l’église de la Conception.
Au moment où le prêtre officiant quittait l’autel, deux jeunes gens se jetèrent à ses pieds en se déclarant réciproquement :
— Je t’aime et je consens à t’épouser.
Le jeune homme est un tout petit employé de la Cour des Comptes, Juan Milla, et la jeune fille s’appelle Josefa Ramirez de Arrellano y Moyano, fille de la richissime marquise de la Fuensenta del Balle.
Les jeunes amoureux étaient accompagnés du comte de Jover, du major Estrada et du dessinateur Antunez. Ces mariages, qu’on appelle matrimonios por sorprisa (mariages par surprise) sont fréquents en Espagne. On les lient pour valables devant l’église.
En tout cas, celui qui nous occupe sera un régularisé : touchée par tant d’amour, la marquise, qui jusqu’à présent s’était obstinément refusée à donner son consentement, vient d’autoriser sa fille à s’unir au roturier Juan Milla.
« Arcachon-journal » 1899.
Peinture de Antonio López García.